Tedi Papavrami
Arrivé très jeune en France, Tedi Papavrami découvrait un pays et une culture qui lui étaient totalement étrangers. Sa curiosité naturelle et son besoin d'apprivoiser la langue française pour pouvoir faire de ce pays le sien, une grande solitude aussi au départ, l’ont poussé à dévorer les livres, toujours en français : Stendhal, Proust, Flaubert, Dostoïevski, Tchekhov, Kafka... Une curiosité dépassant les frontières, alliée à des exigences intellectuelles et artistiques, lui permettant de franchir la distance entre son domaine d'origine et d'autres horizons, singularisent cet interprète rare dans le monde musical.
C'est donc tout naturellement qu'en 2000, après la disparition du traducteur albanais J. Vrioni, il reprendra le flambeau de la traduction de l'œuvre d'Ismaïl Kadaré, qu'il avait connu enfant, en Albanie. Cette échappée dans le monde littéraire devient aussi pour lui un moyen "d'exister professionnellement pour la première fois en dehors du violon". En 2013, elle se poursuit à travers l’écriture de «Fugue pour Violon Seul» aux éditions Robert Laffont. Unanimement salué par la presse, ce récit autobiographique, raconte son parcours d'enfant prodige en Albanie et son passage à l'Ouest, vers la liberté. Par ailleurs, en 2003, remarqué sur un plateau de télévision par l’actrice Jeanne Moreau, Tedi avait campé un Danceny violoniste, aux côtés de Catherine Deneuve, Ruppert Everett et Nastassja Kinski, dans une adaptation de la réalisatrice Josée Dayan des « Liaisons Dangereuses » de Laclos.
Cette diversification n’aurait pourtant pas été possible sans une précocité et une concentration singulières sur le violon, dès ses jeunes années. L’instrument, qui depuis toujours a fait partie de sa vie, lui est transmis à l’âge de 5 ans par son père, brillant professeur, ayant une longue expérience pédagogique. Les progrès de Tedi sont rapides : trois ans plus tard il joue en concert, avec orchestre les Airs bohémiens de Sarasate. À onze ans, il interprète en public le Concerto n°1 de Paganini avec la redoutable cadence d’Emile Sauret.
En 1982 en Albanie, pays coupé du monde, par un extraordinaire hasard arrive pour un concert le flûtiste Alain Marion. Il remarque le jeune virtuose et le fait inviter à Paris en qualité de boursier du gouvernement français. Il y devient l'élève de Pierre Amoyal au C.N.S.M de Paris pendant 4 années. Des apparitions dans des émissions de télévision, telles «Le Grand Echiquier», «Dimanche Martin »…ainsi que de nombreux concerts ponctueront cette période.
A la fin de son parcours d’étudiant, à l’âge de 15 ans, c’est seul que Tedi poursuivra son développement musical et instrumental. Peu avant, avec ses parents, il fuit le régime communiste en vigueur en Albanie pour s’installer avec eux en France. Des sanctions très lourdes s’exerceront en représailles sur le reste de la famille demeurée en Albanie, et ce, jusqu’à la chute du régime communiste en 1991.Tedi et ses parents quittent Paris, afin de ne pas se trouver à portée des fonctionnaires de l’ambassade d’Albanie à leur recherche et s’installent à proximité de Bordeaux, où l’aide d’amis proches leur permettra de s’établir.
A la faveur de plusieurs prix, T. Papavrami entame à partir des années 1990 une carrière de soliste et de musicien de chambre. Il a collaboré depuis en tant que soliste avec des chefs d’orchestre tels que K. Sanderling, A. Jordan, E. Krivine, M. Honeck, F.X. Roth, Th. Fischer, G. Varga, M. Aeschenbacher… En musique de chambre, Il a été durant 9 ans membre du Quatuor Schumann, formation avec piano, et il s’est produit en concert ou au disque avec des partenaires tels que Philippe Bianconi, Nelson Goerner, Martha Argerich, Maria Joao Pires, Viktoria Mullova, Garry Hofmann, Marc Coppey, Paul Meyer ou Lawrence Power.
De nombreux enregistrements ont ponctué depuis 1990 l’activité artistique de Tedi. Paru en 2014, son disque des 6 sonates pour violon seul d’Eugène Ysaÿe et la sonate pour deux violons du même compositeur, en compagnie du violoniste Svetlin Roussev, reçoit simultanément en juin 2014 les distinctions diapason d’or et choc de l’année des revues Diapason et Classica. Egalement transcripteur, il a enregistré ses transcriptions de 12 sonates de Scarlatti ainsi que de la Fantaisie et Fugue de Bach BWV 542, originellement écrite pour l’orgue, partitions disponibles auprès de l’éditeur Ries & Erler Berlin. En violon seul, il s’est souvent produit en concert avec l’intégrale des sonates et partitas de Bach, répertoire qu’il affectionne et qu’il a également enregistré, ainsi que la sonate pour violon seul de Bela Bartok, les 6 sonates de Ysaye ou les 24 caprices de Paganini.
Depuis de nombreuses années Tedi poursuit un travail en duo avec le pianiste François-Frédéric Guy autour des 10 sonates de Beethoven. Leur enregistrement de ces œuvres est paru en 2017. En compagnie du violoncelliste Xavier Phillips ils poursuivent actuellement leur travail autour de l’intégrale des trios de Beethoven qu’ils enregistreront prochainement. C’est le triple concerto de ce même compositeur qu’il interprète aux côtés de Misha Maisky et Martha Argerich dans l’album « Rendez vous » de l’artiste, publié en 2019 par Avanti Classics.
Désormais installé à Genève en Suisse, Tedi occupe un poste de professeur de violon à la H.E.M. Il joue sur un violon construit à son attention par le luthier David Léonard Wiedmer.
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When Tedi Papavrami arrived in France at a young age, he was faced with a country and a culture that were entirely foreign to him. Moved out of natural curiosity paired with a great yearning to master the French language – also to overcome initial loneliness – he plunged into reading Stendhal, Proust, Flaubert, Dostoevsky, Chekhov, Kafka... all in French. What makes Tedi a unique and rare musician is his curiosity for everything that lies beyond borders. Along with his elevated artistic and intellectual standards, it helps him bridge the immense gap between his original background and new horizons.
Therefore, when translator Jusuf Vrioni passed away in 2000, it came as no surprise when Tedi Papavrami took up the task of translating into French the works of Albanian author Ismail Kadare, whom he had known as a child. That incursion into literature also provided him for the first time with “a means of leading a professional existence apart from the violin.” In 2013 he continued in that vein by publishing an account of his own youth, Fugue pour violon seul, in French. Unanimously hailed by the press, the book recounts his trajectory as a child prodigy in Albania and his passage to the West and freedom. Moreover, in 2003, when actress Jeanne Moreau met Tedi in a television programme, she did not hesitate to recruit him to play the role of Danceny, the violinist, alongside Catherine Deneuve, Rupert Everett and Nastassja Kinski in Josée Dayan’s TV mini-series adaptation of Choderlos de Laclos’s Dangerous Liaisons.
Such a wide range of activities and interests would probably not have been possible without an exceptional musical precocity coupled with long hours of practice from a very early age. The violin was always part of Tedi’s life. He was introduced to it at the age of five by his father, a brilliant teacher with many years of pedagogical experience. Tedi progressed very rapidly, and within three years he was performing Sarasate’s Airs Bohémiens with the Tirana Philharmonic Orchestra. At the age of eleven he tackled Paganini’s Concerto No. 1 with the fearsome cadenza by Emile Sauret.
The year was 1982. Albania had isolated itself from the rest of the world for decades. French flautist Alain Marion, who had come to give a concert in Tirana, heard the child prodigy play – and promptly arranged for him to come to Paris with a bursary from the French government. Tedi went on to study with Pierre Amoyal at the Conservatoire National Supérieur de Musique; he also appeared on popular television programmes and gave many concerts at that time.
Having reached the end of his studies by the end of fifteen, Tedi went on perfecting his instrumental and musical skills on his own. In the meantime, he and his parents had fled Communist-led Albania and settled for good in France; back home, however, the regime punished those family members who had stayed behind with severe sanctions and reprisals that would remain in force until the government finally fell in 1991. Before that event, however, Tedi and his parents had to leave Paris in order to avoid Albanian embassy officials who were on their tail. Friends helped them relocate near Bordeaux.
Tedi Papavrami won several important international prizes in the 1990s and embarked on a brilliant solo and chamber music career. He has collaborated as concerto soloist with conductors of the likes of Kurt Sanderling, Armin Jordan, Emmanuel Krivine, Manfred Honeck, François-Xavier Roth, Thierry Fischer, Gilbert Varga and M. Aeschenbacher. He was also a member of the Schumann Quartet (with piano) for nine years. He has performed in recitals and on disc with chamber music partners such as Philippe Bianconi, Nelson Goerner, Martha Argerich, Maria Joao Pires, Viktoria Mullova, Gary Hofmann, Marc Coppey, Paul Meyer and Lawrence Power.
Tedi has been completing his artistic activity with a number of recordings ever since 1990. Released in 2014, his CD featuring the 6 solo violin sonatas by Eugène Ysaÿe and the same composer’s sonata for two violins alongside his colleague Svetlin Roussev was simultaneously awarded two of the most outstanding French distinctions: the Diapason d’Or and the Choc de l’Année (Classica magazine). Tedi has also proven his hand as a transcriber: his solo violin arrangements of 12 Scarlatti sonatas and of the Bach Fantasy and Fugue BWV 542 (originally for organ) are available from the Ries & Erler music publishing house in Berlin. He has frequently performed the complete J. S. Bach sonatas and partitas for solo violin in public – a repertoire of which he is particularly fond and has recorded, along with the solo violin sonata of Béla Bartók, the 6 Ysaÿe solo violin sonatas and the 24 Paganini Caprices.
For many years, Tedi has been presenting the complete Beethoven violin sonatas with pianist François-Frédéric Guy: their recording was released in 2017. Along with cellist Xavier Phillips, they have been pursuing their work on the complete Beethoven piano trios, which they will record soon. On renowned pianist Martha Argerich’s new 2019 release entitled Rendez vous (Avanti Classics), he appears alongside her and cellist Misha Maisky in the Beethoven triple concerto.
Tedi Papavrami now lives in Geneva, Switzerland, where he is violin professor at the Haute École de Musique. He plays a violin made for him by violinmaker David Léonard Wiedmer.
Discographie
Diapason d'or soliste instrumental de l'année 2014 - Choc classica de l'année 2014
Mai 2014 - Nouvel album Ysaÿe - Intégrale des sonates pour violon seul opus 27 et la sonate pour 2 violons avec Svetlin Roussev